Avant de survoler dans un prochain article, les activités de mes confrères illustrateurs animaliers professionnels concernant les bébêtes actuelles, commençons par les pros qui œuvrent sur les organismes disparus.
Vous êtes-vous demandé comment on redonne vie à un animal disparu depuis des millions d’années ?
On observe tout d’abord les restes fossilisés, bien sûr ; on consulte les paléontologues ; mais ce sont des scientifiques, souvent prudents : quand on dessine, il faut faire des choix, et cela se voit.
La plupart du temps, on essaie de se rappocher d’un occupant actuel de la même niche écologique.
Le quetzalcoatlus était le plus grand ptérosaure (“reptile” volant, doc.1) connu quand il fut représenté en 1986 dans un livre sur les géants. Trouvé aux USA, le dessinateur a pensé au jabiru américain, le plus haut des oiseaux du continent (doc.2). Nous pensons encore aujourd’hui que ces êtres vivants se balladaient en profitant de tout animal rencontré ; possiblement bien vu donc... Même si les (semblants de) poils qui couvraient les ptérodactyles ne sont pas très visibles.
Plus récemment, Peter Schouten, représentant des dinosaures emplumés, a décidé de choisir un calao des Célèbes (doc. 3) pour modèle du procératosaure d’Angleterre (doc. 4), pensant que la fragile crête osseuse de ce dernier devait porter de semblables couleurs pour la parade nuptiale... Admettons.
Pour le Monokykus insectivore de Mongolie (doc. 5), qu’on avait tout d’abord pris pour un vieil oiseau ayant perdu la faculté de voler, c’est la grue caronculée d’Afrique (doc. 6), grande dévoreuse d’insectes, qui s’y colle. Plus judicieux sans doute... Les oiseaux sont des dinosauriens, mais saurons-nous un jour la vérité sur l' aspect des disparus ?
De plus, les choses changent.
En 2001, Dan Varner pensait comme certains savants de l’époque, que les mosasaures, grands “reptiles” marins de la fin du secondaire, étaient proches des varans (doc. 7), comme le montre sa version du tylosaure (doc. 8). Au même moment, d’autres estimaient, comme encore aujourd’hui, qu’on doit les rapprocher des ancêtres des serpents (dont les lézards pythonomorphes comme les varans ne sont pas loin, d’ailleurs), d’où les pupilles verticales et la langue serpentiforme du doc. 9.
Les reconstitutions sont donc les reflets des théories en vogue et de l’imagination des artistes. Elles frappent le grand public, comme dans Jurassic Park, quand on ne savait pas que les raptors avaient des plumes...
Le nain paléontologue.
Iconographie :
Calao de Sulawesi : VogelPark Walsrode, web.
Jabiru d’Amérique : Tom Stephenson, web.
Grue caronculée : photo de l’auteur.
Monokykus et Proceratosaurus : Feathered dinosaurs, John Long, Peter Schouten, 2008, Oxford University Press.
Quetzalcoatlus : Animaux géants d’hier et d’aujourd’hui, David Peters, 1987, Hachette jeunesse.
Tylosaurus “serpent”: L’encyclopédie Gallimard jeunesse des dinosaures et de la vie animale primitive 2002 .
Tylosaurus “varan”: Dan Varner, site web Oceans of Kansas.
Varan : Dmitry Tumanov, web.