Au travers de quelques problèmes rencontrés par des illustrateurs, voyons comment ils obtiennent les planches figurant les ouvrages animaliers.
Pour se préparer, 4 approches principales se mêlent, en dehors, bien sûr, de la copie pure et pas toujours simple des collègues :
- les croquis sur le vif (voyage, captivité, film)
- les spécimens naturalisés des collections (musées, universités, particuliers)
- les conseils des auteurs scientifiques (le(s) co-auteur(s), la bibliographie)
- et les photos !
Le peintre tchèque Zdenek Burian nous offre un bel exemple (1) dans cette toile de 1957 servant à introduire l’ère quaternaire dans une encyclopédie de la préhistoire de mon enfance. L’ours des cavernes de gauche nous amène vers une taïga humide où, au détour d’un méandre, on apperçoit un ... bateau ! (2)
À la vue d’autres bévues de cet artiste (moins gênantes, quand même), on peut penser que, le nez sur le motif, il n’a pas vu qu’il (re)produisait un anachronisme flagrant pour cette période antérieure à 10 000 ans.
Que faire quand on n’a pas de document photographique et que l’on n’a pas le courage ou la possibilité d’examiner le sujet de visu ? Inventer..
Certains animaux n’ont pas été vus depuis plusieurs décennies, d’autres ont récemment disparu, ou n’ont jamais été présentés dans certaines activités. Deux exemples.
Les guêpiers carmin (3) profitent de gros “porteurs” (outardes, antilopes) pour surveiller les insectes qu’ils attrappent au vol. William T. Cooper (déjà évoqué) a choisi ici un magnifique oryx. L’ennui, c’est que l’échelle n’est pas respectée : l’oiseau de 35 cm queue comprise est ici multiplié par trois, à moins que ce ne soit le bovidé africain qui soit nain. Raté !
Les pénélopes sont des gallinacés qui ne volent pas très souvent ; Jon Fjeldså (4), pourtant excellent graphiste et aquarelliste, utilise beaucoup les photos mais représente ici de petites ailes de proportions propres à celle d’une grosse poule de ferme, perdu qu’il a du être, alors qu’un simple faisan aurait pu lui sauver la mise...
Et faut-il encore que cela paraîsse vraisemblable. Observons une “erreur de casting”.
Gaëtan du Chatenet est le chantre du détail : les textures des carapaces, écailles, nervures, cuticules, et autres peaux n’ont pas de secrets pour lui.
Tout va bien quand il dessine végétaux, crustacés ou insectes, mais moins les vertébrés.
Les oiseaux ont l’air plats et secs, comme naturalisés. Ce geai des chênes (5) planant dans un livre dédié à ses semblables, a l’air d’un boeing 747 pris au grand angle. La réduction due à la perspective ne s’applique pas pas à un oiseau de 30 cm. Malgré la minutie apportée au plumage, le volume peine à être rendu.
Trouver le(a) bon(ne) candidat(e) n’est donc pas facile...
Le nain paléoiconornithophile.
(1)(2) Encyclopédie de la préhistoire, 1973, eds la farandole.
(3) Dans Peintres et illustrateurs d’oiseaux, 1991, Abbeville Press.
(4) Birds of the High Andes, 1990, zoological museum University of Copenhagen & Appolo Books, Svenborg.
(5) Les geais du monde, 1990, Geai 80’.